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décembreConseils pour infirmières à destination du Grand Nord (1ère partie)
Avouons-le. Aller travailler dans le grand nord Canadien ou en région éloignée est une aventure unique! À un moment ou le système de santé est en pleine ébullition, plusieurs veulent se lancer dans cette aventure. Cependant, la peur de l’inconnu, le manque de confiance en soi, l’éloignement et les défis potentiellement rencontrés au grand nord, freinent les ardeurs et empêchent de faire le saut. Afin d’éviter de transformer cette expérience enrichissante et pleine d’enthousiasme en une expérience malheureuse et désagréable, vous trouverez ici, 12 conseils de la part d’infirmières expérimentées travaillant au sein des communautés autochtones au Canada.
Leurs conseils vous guideront et vous permettront de faire un choix plus éclairé.
1. Les communautés autochtones
Avec plus de 600 communautés d’un océan à l’autre, les communautés autochtones représentent 4,3% de la population Canadienne. Bien que la population autochtone soit importante dans les grandes villes, ces communautés vivent dans des réserves dirigées par des conseils de bande. Population diversifiée constituée par les premières nations, les inuits et les métis, leur histoire est liée au colonialisme, au racisme et aux pensionnats, dont l’impact est encore palpable aujourd’hui.
L’effet des déterminants sociaux de la santé, bien visibles, sont importants à connaître pour toute infirmière qui souhaite aller travailler en région éloignée. Travailler en région éloignée est une excellente opportunité professionnelle pour quiconque souhaite développer ses compétences, gagner en autonomie et relever des défis ambitieux.
Mon conseil pour les infirmiers qui veulent aller travailler en région éloignée : Sachez quelles sont les motivations profondes qui vous poussent à y aller. Je suis très sincère! Si l’argent est votre seule motivation, vous irez au grand-nord en passant carrément à coté de cette expérience inestimable et surtout, vous ne l’aimerez pas.
Maude S. Infirmière2. Le voyage et la destination
Mon premier contrat de travail au grand-nord était au Nunavik, en terres Innuit. Une destination vers l’inconnu que je savais froide et sauvage. Avant mon départ, ma famille et mes amis me disaient "Mais que vas-tu faire là -bas? Il fait trop froid, il y a des ours, c’est dangereux! ".
J’étais anxieuse de sortir de ma zone de confort. Je laissais derrière moi, ma famille, mes amis, ma maison et tous mes repères. Le jour du départ, j’ai dû payer des frais pour bagages excédentaires car mon vol n’était ni un charter, ni un vol nolisé.
Puis, le voyage a débuté à bord de l’avion Air inuit. Par la suite, un changement à Kuujjuaq pour un plus petit avion m’a conduit à Kanjiqsualujjuaq (George river).
En vol, je pouvais remarquer les grandes étendues blanches couvertes par la neige et la quasi-absence d’arbres. À mon arrivée, j’admirais ces étendues blanches à perte de vue. Un véritable chef d’œuvre de la nature! Montréal et mon petit appartement de côte-saint-Luc étaient bien loin de ce panorama. L’émotion était si intense que je failli en pleurer. J’en perdais mon souffle tout en me disant, "waou! Que la nature est merveilleuse!"
Mon conseil pour les infirmiers qui veulent aller travailler en région éloignée : Préparez-vous à découvrir un trésor caché de la nature. Dépaysement total assuré! Aussi, pesez vos bagages avant votre départ pour éviter de mauvaises surprises.
Marie-Michelle P. Infirmière3. Le choc culturel
Cela faisait environ 1 mois que j’étais infirmière à l’hôpital de Chisassibi. L’ambiance de travail était super et j’avais d’excellent rapports avec mes collègues de travail. Une collègue autochtone m’invita au "walking out ceremony" de son fils. C’est la cérémonie des premiers pas. Rituel perpétré depuis longtemps, il a lieu quand l’enfant commence à marcher et, permet à la communauté de l’accueillir officiellement.
J’étais curieuse de connaître la culture et les traditions cris (peuple autochtone largement réparti au Canada). Alors, j’accepta avec joie. La cérémonie débuta à l’aube sur une scène naturelle et grandiose. Soleil levant, légère brise matinale, chants des oiseaux, vêtements traditionnels et grand tipi décoré, tout était au rendez-vous! Ma collègue me fit un sourire en guise de bienvenu.
Je regardais la cérémonie avec des yeux pleins de respect et d’admiration. Je trouvais génial leur capacité à garder les traditions vivantes, mais encore plus, la confiance qu’ils m’avaient témoignée en m’invitant. J’étais privilégiée et reconnaissante.
Mon conseil pour les infirmiers qui veulent aller travailler en région éloignée : Soyez curieux, ouverts, patients et vous découvrirez des traditions uniques!
Gisèle N. Infirmière4. L’hiver, le froid et les vêtements adéquats
Une chose que j’ai regretté de ne pas savoir avant mon départ au grand nord, c’est comment préparer ma valise adéquatement pour affronter l’hiver nordique. Rapidement avant mon départ, j’avais acheté une belle paire de bottes en fausse fourrure et un manteau doublé qui, selon moi, seraient assez chauds pour mon séjour au grand-nord Canadien. J’avais oublié mes mitaines et mon petit bonnet couvrait à peine mes oreilles.
Eh bien! Croyez-moi, je m’en souviendrais toute ma vie. Il faisait si froid ce jour-là . Une marche de 10 minutes à l’extérieur puis, j’avais presque des engelures aux pieds, aux mains et aux oreilles. Je grelottais comme une feuille morte, j’en pleurais de douleur. Heureusement pour moi, tout s’est bien terminé et je n’ai pas perdu l’usage de mes extrémités.
Mon conseil pour les infirmiers qui veulent aller travailler en région éloignée en hiver : Renseignez-vous sur les conditions climatiques de la région où vous allez, sachez les activités extérieures que vous souhaitez faire (ski, randonnée, moto-neige) puis, équipez-vous en conséquence. La limitation de poids autorisé pour vos bagages vous imposera de faire des choix. Néanmoins je recommande :
Des vêtements thermolactyls, des leggins et des vêtements moulants que vous pourrez mettre en première couche.
Des chandails fins que vous utiliserez en isolation ou seconde couche (Les marques de type The North Face ou Insulato sont excellentes). Si vous ne prenez pas de chandails fins, une doudoune doublée fera l’affaire.
Une veste-parka contre le vent et imperméabilisée servira de 3 ème couche. Avant de porter cette couche, vous prendrez soin de mettre votre pantalon de neige.
Des chaussettes en laine de mérinos bien chaudes.
Des bottes pouvant vous protéger minimalement à -40˚C et prenez-les assez grandes, car vous utiliserez des chaussettes en laine épaisse. Les bottes SOREL OU BAFFIN sont un bon choix. De plus, vous pouvez les accompagnés de semelles chauffantes.
Une combinaison de neige ou un pantalon de ski doublé et un manteau doublé imperméabilisé, avec capuche et poches.
Un bon bonnet, 1 cagoule, gants, moufles, écharpe ou cache-cou, lunettes de ski et lunettes de soleil.
Et enfin, de la crème hydratante pour la peau le soir et de la crème solaire le jour.
J’espère que ces conseils vous seront utiles.
Paul P. Infirmier5. À quoi vous attendre si vous allez au Grand-nord Canadien en été?
La population Inuit, est très accueillante et le climat d’été au Nunavik est variable. En général, les journées chaudes (autour de 20˚C), précèdent des soirées et des nuits fraîches (autour de 0˚C). Mais, le plus surprenant en été, c’est le soleil de minuit et les moustiques.
Eh oui! L’été au Nunavik, Il ne fait presque jamais nuit et les moustiques sont les rois.
La nature est un peu différente. Les grandes étendues blanches hivernales laissent la place à un sol, couvert de fleurs sauvages et les cours d’eau foisonnent de poissons, faisant le bonheur des pêcheurs.
Concernant l’habillement, apportez des vêtements confortables, une veste de laine polaire et un bon coupe-vent, des chaussures de marche et des lunettes de soleil.
Mon conseil pour les infirmiers qui veulent aller travailler au Grand-nord en été: Munissez-vous d’un bon chasse-moustique ou d’un filet de protection si vous ne souhaitez pas finir en plat de choix pour les moustiques.
Chantal T., Infirmière6. L’eau, la nourriture et les boissons au grand nord
S’approvisionner en nourriture au Grand-nord n’est pas une mince affaire! Les fruits et légumes frais ne sont pas disponibles tous les jours. Quand on en trouve, c’est deux fois plus cher qu’à Montréal. En effet, les denrées alimentaires sont livrées par bateau ou par avion, ce qui explique ce coût élevé.
Les viandes traditionnelles des populations autochtones vous surprendront certainement. Des plats à base de viande d’ours, de caribou, outarde ou castor agrémentés de baies, sirop d’érable, pin ou bouleau puis, accompagnés de bannock (pain) sont courants chez les habitants de la baie James. Au Nunavik, des plats de béluga, bœuf musqué, phoque, poisson, morse et oursins sont fréquents.
Étant donné le coût élevé des fruits et légumes et leur disponibilité occasionnelle dans ces régions, il n’est pas facile d’appliquer les recommandations du guide alimentaire Canadien consistant à manger beaucoup de fruits et légumes.
Avec l’obésité et le diabète ayant atteints des proportions inquiétantes dans ces régions, l’enseignement concernant une alimentation saine et équilibrée devient un défi pour le professionnel de la santé qui ne connait pas l’alimentation traditionnelle autochtone.
Les populations quant à elles bien que réceptives à cet enseignement, n’ont pas toujours les moyens d’adopter une alimentation riche en fruits et légumes. Certains programmes d’aide alimentaires sont cependant disponibles notamment pour les femmes enceintes et les familles les plus défavorisées.
Pour les besoins alimentaires des professionnels de la santé qui vont travailler au nord, le mieux reste d’apporter le plus possible de nourriture pour votre séjour. Épices, fruits secs et préférences alimentaires personnelles sont à prévoir dans vos bagages.
Les boissons alcoolisées ne sont pas vendues sur les réserves autochtones. Pour l’eau potable, pas de soucis pour la région de la Baie James. En revanche, au Nunavik, vous aurez à faire très attention à l’eau. À cause du pergélisol et du sol rocheux, les conduites d’eau souterraines ne peuvent être installées. L’eau est distribuée aux résidents par des camions-citernes. Votre logement aura donc un réservoir d’eau potable et un réservoir d’eau usée. Pour ne pas manquer d’eau avant l’approvisionnement suivant, vous devrez éviter le gaspillage car, une fois toute l’eau potable consommée, ou une fois le réservoir d’eau usée rempli, vous n’aurez plus d’eau! Vous devrez alors communiquer avec le service technique de la municipalité pour corriger le problème.
Mon conseil pour les infirmiers qui veulent aller travailler au Grand-nord en été: Apportez vos épices et fruits secs puis, adaptez votre consommation d’eau. Après tout, les ressources de la nature ne sont pas inépuisables, soyez-en conscient!
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